La mosaïque du Seigneur Julius
Par Zaher Kammoun
Cette mosaïque a été découverte à Carthage par Alfred Merlin en 1920 sur le flanc nord de la colline de Byrsa près des édifices des colonnes et datée de la fi du 4ème siècle ou du début du 5ème siècle
Elle mesure 4,50 mètres sur 5,65 et composée de 3 registres
Description des registres
Au centre se dresse une grande demeure présentée comme un château fortifié. Elle est construite en blocage épais et constituée par un corps de logis à deux étages auquel sont accolées aux angles deux tours carrées. Sa façade est aveugle et percée en son milieu par une seule ouverture cintrée que ferme une solide porte de bronze à deux battants. Chaque tour est couverte de toit en tuiles et comporte une porte rectangulaire et une fenêtre longue et étroite
Les deux tours sont reliées entre elles par une galerie placée en premier étage. Cette galerie est ornée en arcades et colonnettes en marbre blanc
Derrière le corps de logis et à droite se trouvent quatre tours rondes coiffées de coupoles (elles peuvent être des thermes), trois d’entres elles sont surmontées de cheminées d’où monte de la fumée. A gauche et près d’un palmier se trouve un bâtiment quadrangulaire construit en gros appareil et recouvert d’un toit de tuiles à double inclinaison. Il est percé par une large bais voutée qu’entoure un encadrement de marbre blanc et doit constituer l’un des pavillons du corps de logis
Autour du château se trouvent plusieurs scènes divisés en 3 registres :
Le registre du milieu
- Le maitre au centre à gauche a chevauché un bel étalon gris pommelé, équipé d’un tapis. Il est vêtu d’un manteau rouge et d’une tunique blanche longue et ample ornée sur les manches de broderies bleu vert. Ses pieds sont chaussés de souliers blancs. Un valet à pied vêtu d’une tunique courte accompagne le seigneur. De la main gauche il tient une corde à laquelle est attaché un sac à provisions qui pend sur son dos et de la droite tendue en avant, il semble activer le cheval
- De l’autre coté du château se trouve deux valets : le premier sans doute est rabatteur et tient d’une main un long bâton et maintient de l’autre sur son épaule un grand filet qui servira à organiser le parc dans lequel on poussera le gibier, il porte une tunique courte et serrée, un pantalon collant et des guêtres nouées au dessous des genoux. Son compagnon (il ne reste que ses genoux) tient en laisse deux lévriers bruns zébrés de noir ayant au cou un collier à anneau. L’un des chiens flaire le sol à la recherche du lièvre déjà caché dans un buisson
Le registre du haut
Il présente quelques scènes montrant deux saisons :
- En haut et à gauche l’hiver : un petit garçon est en train de gauler un olivier l’autre ramasse les olives. Les deux paysans portent une tunique courte, une pèlerine à capuchon pointu et de hautes guêtres. A coté se trouve un chasseur qui arrive en courant, les bras chargés de deux canards. Son costume est composé de pantalon, d’une tunique à manches et d’un manteau muni d’un capuchon très ajusté à la tête. A droite de l’olivier, une servante à chevelure soigneusement peignée habillée d’une robe brune ornée de bandes verticales noires, apporte un panier rempli d’olives à la femme du seigneur qui est assise sur un banc rustique à l’ombre d’un bois de cyprès. Elle est vêtue d’une longue robe de soie transparente vert bleu très décolletée. Ses poignets sont ornés de bracelets en or. Une chevelure noire encadre sa tête et retombe sur ses épaules. De la main gauche elle s’appuie sur le banc et agite de la droite un petit éventail de paille tressée devant son visage. A coté d’elle se trouve un panier plein de fruits. sous le banc, une mue abrite une poule autour de laquelle picorent des poussins. Plus loin se trouve un coq qui gratte la terre
- L’angle droite évoque l’été : on voit un champ de blé aux épis dorés et murs près duquel un vieux berger barbu assis à l’ombre d’un arbre chétif et garde un troupeau de moutons et de chèvres. Au pied du personnage est couché un chien. Un chien d’allure plus sauvage est attaché devant une hutte de paille. A gauche de cette scène, une servante blonde vetue d’une longue robe a pris un agneau nouveau né qu’elle présente à la châtelaine
Le registre du bas
Il présente aussi deux saisons :
- A gauche se trouve le printemps : un jardin planté en fleurs est présenté. La femme du seigneur apparait cette fois debout, les jambes croisées et le coude appuyé sur une colonnette cannelée. Elle porte une longue robe de soie blanche, fine et transparente rehaussée de bandes verticales et broderies. Ses cheveux sont rassemblés en chignon au sommet de la tête et son front est ceint d’une large et riche diadème. De longs pendants ornent ses oreilles. Elle se contemple dans un miroir qu’elle tient de la main gauche et s’apprête à prendre, de la droite, le collier que lui propose une jeune servante qui porte un coffret d’ivoire incrusté de filets d’argent et ou sont rangés de nombreux bijoux. Avec sa chevelure blonde, retombant sur ses épaules et sa robe brune agrémentée de bandes verticales noires, elle rassemble fort à la jeune femme qui porte un agneau dans le premier registre. Devant la femme, un jeune garçon le dos courbé vide un panier plein de poissons. Derrière elle au milieu des rosiers, a été installé un grand fauteuil rouge et garni de coussin. Dans l’angle, se trouve un serviteur qui s’apprête à poser aux pieds de la châtelaine un panier plein de roses
- A droite se trouvent les activités de l’automne : le seigneur nouveau représenté assis sur un banc entre un pommier en fruits et un ormeau autour duquel s’enroule une vigne chargée d’une lourde grappe. Il est vêtu d’une majestueuse tunique, longue et ample de couleur blanche, ornée de galons et de bandes pourpres. Il tend à la main droite pour recevoir un rouleau que lui remet un serviteur. Sur le parchemin est inscris le nom du destinataire D(omi) no Ju(lio) (au seigneur Julius).
- Derrière Julius, a coté d’une porte métallique qui sert à fermer l’entrée du domaine, arrive un second serviteur portant sur le dos un grand panier rempli de raisin et tenant de la main gauche par les pattes postérieures, un lièvre vivant capturé sans doute dans la vigne
Cette œuvre exposée aujourd’hui au musée du bardo, présente un intérêt exceptionnel sur le plan documentaire. Il montre la vie quotidienne dans l’Afrique romaine au 4ème siècle surtout les grands domaines agricoles
Sources
- Splendeurs des mosaïques de Tunisie, Mohamed Yacoub
- Les merveilles du musée du Bardo, Mohamed Yacoub
- Peinture de pierres, les mosaïques du musée du Bardo, Mohamed Yacoub