La Skhira

Par Zaher Kammoun

Suite à l’installation de la station pétrolière de la Skhira en 1958, des fouilles urgentes ont été faites sur le site à 45 km au Sud de Mahrès à Sfax

Deux basiliques et un baptistère furent dégagés en 1961. Les sondages et les photos aériennes ont révélé la présence, sur le littoral, d’une agglomération antique d’une dizaine d’hectares entourée par un fossé de protection. A proximité se trouvent plusieurs nécropoles romaines et chrétiennes

Skhira الصخيرة

Au nord est de ce site, les fouilles ont permis la découverte d’une grande basilique et son baptistère. A 500 m au nord ouest du fossé, se trouve une église cimétériale à trois nefs

Skhira الصخيرة

La grande basilique se trouve près des réservoirs de la Trapsa à l’intérieur d’une enceinte de protection, elle était construite de matériaux rudimentaires. Plusieurs étapes de construction ont été enregistrées :

  • Au 4ème siècle, une basilique à 5 nefs a été érigée sur un site occupé de plusieurs sépultures recouvrant elles-mêmes des vestiges d’époque antérieure. Un portique fermé ornait la façade orientale et la porte est le seul endroit ou on trouve de la pierre de taille. Les murs intérieurs sont en briques crues et étaient recouverts d’un enduit ou les fresques en trompe l’œil imitaient des pilastres et des placages de marbre ou reprenaient d’autres motifs décoratifs classiques. Elles tranchaient avec le dallage de schiste ardoisier bleu-noir.

L’abside, entourée de plusieurs petites sacristies, dominait de 75 cm le reste de la construction, on y accédait par un large escalier. Un banc semi circulaire en faisait le tour. La voute en-cul-de four était en béton de gravier très solide. Des fragments de cette voute ont été retrouvés. Des stucs revêtaient les chapiteaux. Sur une plate forme et au dessus des tombeaux, devait se trouver l’autel

  • Au 6ème siècle sans doute, on créait une deuxième abside au nord est, ou se situera désormais le chœur de l’église. A ce moment la, ou peut être déjà auparavant, deux portes latérales avaient été ouvertes sur les bas cotés. Le répertoire de la seconde étape est caractérisé par des symboles chrétiens. La mosaïque semi-circulaire  du centre de l’abside est constituée par les arabesques des rinceaux s’échappant d’un grand calice. Devant l’abside, une plate forme s’étendant jusqu’au quatrième entrecolonnement est richement décorée de mosaïques : très proche de l’abside, on trouve quatre panneaux se répartissant de part est d’autre d’un espace vide, ou devait sans doute être l’abside autel. Un panneau présente deux cervidés tendant le cou vers un grand canthare, d’où sortent des rameaux qui se terminent en bouton de fleur. Un autre panneau représente deux animaux se faisant face, sans doute des agneaux mais il n’en reste plus que les croupes

A deux mètre devant cette plate forme, quatre tronçons de colonnes creusés de profondes mortaises sont, pour Mr Fendri, les bases de montants de bois assez importants pour être ceux d’une iconostase

  • Après le 6ème siècle après J.C, on installait un tombeau au centre de l’abside occidentale (c’est une sépulture creusée dans le sol), une autre modification a été enregistrée : c’est la construction d’une autre plate-forme nettement plus importante que l’estrade primitive et à laquelle on accède par de petits escaliers latéraux. Les restes de trois tables liturgiques ont été retrouvés

A quatre mètres derrière l’abside sud ouest, ce trouve le baptistère relié à l’église par un vestibule transversal. Quatre demi-colonnes encadrent deux ouvertures se faisant plus ou moins face indiqueraient peut être une couverture en voute.  Des sacristies flanquent le vestibule. La salle baptismale surélevée par rapport à tout l’ensemble, est divisée en trois nefs par une double rangée de six colonnes. Au centre, se trouve un carré en maçonnerie de 3,2m de coté, aux angles duquel quatre bases de piliers montrent encore l’emplacement du baldaquin. La cuve baptismale est quadrilobée, un bassin secondaire est placé plus haut que la cuve. Le sol du baptistère était couvert en mosaïques :

  • Deux grands panneaux à décor géométrique se trouvent de part est d’autre du carré baptismal, dans le sens des nefs
  • Une mosaïque se trouvant entre l’entrée de la salle et la cuvé est divisée en quatre par des torsades : dans les deux panneaux supérieurs, on trouve des cervidés. Chaque panneau du bas contient deux croix latines gemmées aux branches desquelles pend un e lampe allumée. Une colonne torse sépare chaque croix. Deux colombes sont perchées sur les tirants reliant les chapiteaux. Les entrecolonnements eux-mêmes sont surmontés par des arcs associant ainsi dans une idée de triomphe de la colombe, la croix et la lumière

Une tombe d’une certaine Matrona que l’on sait vidua est ornée en mosaïque avec différents symboles religieux  et épitaphe. Mr Fendri la date du 5ème siècle après J.C. Ce pavement est exposé aujourd’hui au musée de Sfax

Skhira الصخيرة

Le pavement de Matrona

Mr Fendri a identifié le site peut être au port de Lariscus

La grande basilique de Skhira a dévoilé 4 tableaux mosaïques datés du 6ème siècle après J.C:

  • Deux cerfs au milieu des rameaux stylisés chargés de fleurs et de fruits. le cerf représente le fidèle aspirant de baptème

Skhira الصخيرة

  • Carrés renfermant chacun deux croix latines gemmées aux branches desquelles sont accrochés deux coupes d’où s’échappent une flamme, symbole de la lumière éternelle. Deux colonnes torses supportant des arcs entourent chaque croix. Ce tableau présente une influence orientale

Une partie du pavement Skhira

  • Deux cerfs au pelage tacheté buvant dans un canthare d’où jaillissent deux rameaux fleuris. Représenté sur un pavement du baptistère. Le cerf symbolise les nouveaux baptisés

Skhira الصخيرة

  • Décor géométrique composé d’une série de carrés ornés alternativement de deux bandes blanches entrecroisées selon les diagonales et de fleurons lotiformes séparant les branches fusiformes d’une fleur quadripétale

Skhira الصخيرة

Les tableaux de mosaïques de la Skhira ont deux caractéristiques : un décor qui laisse peu d’espaces libres et présente plusieurs inspirations orientales

  • Une cartouche à inscription dédicatoire date du 6ème siècle aprs J.C et trouvée à la salle baptismiale de la grande basilique de la Skhira

Skhira الصخيرة

  • Quelques objets chrétiens exposés dans le musée de Sfax : des lampes en terre rouge qui présentent des symboles chrétiens comme ; rosace, lion, cheval, lion, bélier, coq, chien, le sacrifice d’Abraham, des vases en poterie rouge, vases à bords recourbés, des plats, des coupes en verre, deux colliers en verre bleu-violet, boucles d’oreilles en cuivre, bracelet en verre opaque, une croix latine en bronze, cruches en poterie tournée blanchâtre, plats en poterie rouge
  • Une croix avec chaînettes en bronze, 6ème siècle après J.C

Skhira الصخيرة

Sources

  • Cités antiques et villas romaines de la région Sfaxienne, Mohamed Fendri
  • Mohamed Fendri (avec le concours de Madame N. Fendri), basiliques chrétiennes de la Skhira, Hadermann Misguich Lydie
  • Les iles kneiss et le monastère de Fulgence de Ruspe, Ameur Oueslati, Roland Paskoff, Hédi Slim, Pol Trousset
  • Guide du musée de Sfax M Yacoub
  • Splendeurs des mosaïques de Tunisie Mohammed Yacoub

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