La synagogue de Naro Hammam Lif
Par Zaher Kammoun
La synagogue de Hammam Lif (Naro) a été découverte au début du Protectorat (en 1883) sur la plage au pied de djebel Boukornine en Tunisie
Plan
Cette synagogue se présente sous un plan de type palestinien. Un carré presque régulier d’environ 20 m de coté. La façade principale est précédée d’une cour extérieure. Cette façade était ornée de deux colonnes qui soutenaient sans doute un fronton. La porte monumentale donnait accès à un portique qui était flanqué à droite d’un long mur plein et à gauche de deux petites chambres
Par ce portique on gagnait un vestibule rectangulaire de même largeur mais moins profond
A gauche du vestibule, une petite porte mène à une chambre
En face de l’entrée monumentale, une large porte faisait communiquer le vestibule avec le sanctuaire. Sur le seuil une inscription rappelait les noms de donateurs qui avaient fait les frais du parage en mosaïque :
Asterius, filius Rustici arcosinagogi, Margarita, Riddei (filia), partem portici tesselavit’’
ou
« Asterius, fils de Rusticus, le chef de la synagogue, et Marguerite, (épouse ?) de Riddeus, ont fait paver de mosaïque une partie du portique »
Le sanctuaire proprement dit était un rectangle allongé d’environ 10m sur 6m de coté. Il présentait à l’ouest une niche arrondie qui rappelle les mihrabs des mosquées. Le sol était couvert d’une mosaïque divisée dans le sens de la largeur en trois champs de dimensions différentes : des oiseux, des quadripodes, des fleurs, des fruits encadrés par des rinceaux.
La mosaïque du milieu plus étendue est partagée en trois compartiments : en haut on voyait un paysage maritime avec des poissons et des oiseux aquatiques, en bas un paysage terrestre des palmiers ombragent un cratère et sur les anses des cratères deux paons affrontés. Dans le compartiment du milieu une dédicace encadrée d’un cartouche à queues d’aronde, entre deux chandeliers à sept branches et d’autres instruments liturgiques, apprenait au dévots ou aux visiteurs que le sanctuaire avait été pavé en mosaïque aux frais d’une dame nommée Juliana :
Sancta(m) Sinagoga(m) Naron(itanam) pro salutem suam ancilla tua Juliana p(uella) de suo proprium teselavit
Ou
« La sainte synagogue de Naro, c’est, pour son salut, ta servante Juliana de Pt(olemaïs ?) qui en a fait faire le pavement de mosaïque à ses frais ».
Au nord ouest du sanctuaire, mais sans communication avec lui, derrière la niche, s’étendait une grande chambre rectangulaire tournée vers l’extérieur. Dans l’angle sud est du sanctuaire s’ouvrait un long couloir qui donnait accès à plusieurs salles, deux à gauche, trois à droite qui menait à autant de chambres
La première chambre servait de dépôt pour les instruments de culte et les livres sacrés comme l’annonçait une inscription encastrée dans la mosaïque du sol :
I(n)strumenta servi tui Nar(on)itanus ; i(n)strumenta servi tui a Narone
La synagogue proprement dite abstraction faite des annexes comprenait environ quinze pièces groupés autour d’un portique d’entrée, d’un couloir transversal et du sanctuaire. La destination des pièces est inconnue, beaucoup étaient ornées de mosaïques : des chandeliers à sept branches, lions, hyènes, coqs, perdrix, pintades, canards, poissons, arbres, corbeilles de fruits, un buste de jeune homme aux longs cheveux tenant sur l’épaule un bâton recourbé, un buste de femme casquée portant une haste
Il nous reste une douzaine de panneaux de mosaïques de cette synagogue qui se trouvent au Brooklyn Museum à New York. Trois autres mosaïques se trouvent au Musée du Bardo à Tunis, elles contiennent des inscriptions en Latin. Deux contiennent le mot SYNAGOGA et une autre indique l’endroit où on pose les ‘livres sacrés’ (Heikhal).
L'emplacement des pavements de mosaïque dans la synagogue
Datation
Quelques spécialistes datent cette synagogue de la fin de l'époque vandale ou l’époque byzantine (6ème siècle après J.C) d’autres la date de la période romaine du 3ème au du 4ème siècle après J.C
Sources
- Les synagogues de Tunisie : recherches architecturales Ahmed Saadaoui
- Les colonies juives dans l’Afrique romaine PAUL MONCEAUX
- Inscriptions juives et judaïsantes de l'Afrique romaine, Yann Le Bohec
- Le site Harissa