Le parc national de l’Ichkeul

Par Zaher Kammoun

Le parc national de l’Ichkeul a été créé en 1980 par le décret ministériel n°80-1608 du 18-12-1980, il est situé à 75 km de Tunis, à 34 km de Bizerte et à 15 km de Menzel Bourguiba et de Mateur

Ce parc s’étend sur 12600 ha, il est constitué de trois entités :

• Le lac : 8500 ha
• Les marais : 2737 ha

• Le Djebel : 1663 ha

Le point culminant du djebel atteint 511 m et le lac a une profondeur de 1 à 2 m

Climat

Le climat du parc est méditerranéen à étage bioclimatique subhumide. La pluviométrie moyenne est d’environ 600 mm par an. La température moyenne annuelle est de 18.1°C avec un minima de 8°C et un maxima de 30°C. l’humidité peut atteindre 82%. La région est aussi réputée par la fréquence des vents (environ 200 jours/ an) surtout les vents Nord-Ouest qui apportent des pluies et engendrent l’agitation des alluvions fins au fond du lac ce qui confère à ses eaux une teinte terreuse foncée

Hydrologie

Le lac de l’Ichkeul est l’exutoire d’un vaste bassin versant de 2080 km. Il est également relié à la mer par le biais du lac de Bizerte via le l'Oued de Tinja

En hiver le lac est alimenté par 6 oueds : Oued Joumine/ Ettine, Oued Melah, Oued Sejnane, Oued Douimis et Oued Ghzala. Son niveau dépasse alors le niveau de la mer et l’eau douce inonde les marais et la salinité descend en dessous de 10 g/L voire 5 g/L. L’eau douce s’écoule vers le lac de Bizerte par le L'Oued de Tinja. En été et sous l’effet de l’évaporation, le niveau du lac descend en dessous de celui de la mer, le courant du lac de Tinja s’inverse et l’eau salée pénètre dans le lac. La salinité des eaux du lac peut dépasser celle de la mer (40 g/L)

Géologie

Le djebel Ichkeul est constitué de roches calcaires, dolomitiques et du marbre qui datent du Trias et du Jurassique. Ce djebel se dresse au milieu d’une plaine d’alluvions d’âge quaternaire. La roche poreuse permet l’infiltration des eaux de pluie, cette eau descend à des grandes profondeurs ou elle s’enrichit en minéraux comme le soufre. Elle se réchauffe à plus de 40°C puis elle remonte

Au pied de la montagne jaillissent des sources chaudes et sulfureuses, utilisées par la population locale pour des cures thermales comme la source d’Ain Abbes (située à l’emplacement du parking), source de Ain Atrous (située à la base du piémont nord de la montagne) et une autre source d’eau chaude située à environ 300 m à l’Ouest de Ain Atrous

Les fouilles paléontologiques au bord du lac ont mis à jour des fossiles d’ossements âgés de plus de 2 millions d’années provenant de mastodontes, d’éléphants fossiles, de rhinocéros, des girafes et d’autres animaux de climat tropical. Des huitres fossiles de plus de 40 cm ont été aussi découverts

Histoire

Depuis la préhistoire, l’homme s’est intéressé au djebel de l’Ichkeul avec ses grottes et ses sources thermales. Des outils en silex et en obsidienne ont été trouvés près des sources chaudes et des anciens marabouts. Les phéniciens ont aussi habité le parc et ceci a été confirmé par la présence de la poterie. Des vestiges romains sont encore visibles surtout près du hammam Ben Abbeès

A la pointe Sud-Ouest du djebel, se trouvent les traces de l’exploitation d’une carrière de marbre par les romains. Il est probable que les colonnes et les plaques de marbre utilisées par les romains pour construire Carthage aient été acheminées par bateau depuis les carrières à travers le lac de l’Ichkeul, le passage de Tinja, le lac et le canal de Bizerte jusqu’à la mer et Carthage

Dates importantes

• 1240 : réserve de chasse sous la dynastie des hafsides
• 1890-1897-1903- 1926 : l’Ichkeul devient progressivement propriété du domaine public de l’Etat
• 1977 : l’Ichkeul est retenu par l’UNESCO comme réserve de la Biosphère (MAB)
• 1979 : l’Ichkeul est inscrit dans la liste du patrimoine mondial naturel UNESCO
• 1980 : l’Ichkeul est devenu parc national
• 1980 : l’Ichkeul est inscrit à la convention RAMSAR
• 1988 : jumelage des parcs de l’Ichkeul et d’El Kala en Algérie

Flore

Il y a 3000 ans, la majorité des plaines et des collines du nord de la Tunisie étaient couverts d’une forêt d’oléastres, de lentisques et de caroubiers sauvages qui ont laissé de la place aux cultures après. Le djebel Ichkeul conserve encore une partie de cette forêt. Les vents Nord-Ouest ont donné des formes en drapeau à ces oléastres.

Le parc de l’Ichkeul présente une richesse floristique importante avec la présence de 500 espèces

On note la présence de 13 espèces d’orchidées.

Nom vernaculaire	Nom latin
Oléastre ou olivier sauvage	Olea europea
Lentisque	Pistacia lentiscus
Caroubier	Ceratonia siliqua
Philiaire	Phyllirea angustifolia
Asperge	Asparagus albus
Câprier	Capparis spinosa
Euphorbe arborescente	Euphorbia dendroides
Potamot à feuilles étroites	Potamogeton pectinatus
Grand roseau	Phragmites communis
Scirpes	Scirpus maritimus
Tamaris	Tamarix africana
Bruyère multiflore	Erica multiflora
Chrysanthème couronné	Glebionis coronaria
Genévrier de Phénicie	Juniperus phoenicea
Liseron tricolore	Convolvulus tricolor
Cyclamen d’Afrique	Cyclamen africanum
Liseron tricolore	Convolvulus tricolor

Faune

Le parc de l’Ichkeul présente une richesse floristique importante avec la présence de 229 espèces

Plusieurs milliers d’oiseaux d’eau migrateurs viennent des pays de l’Europe Centrale et du Nord ou ils se reproduisent durant le printemps et l’été, pour passer l’hiver à l’Ichkeul comme les canards et les foulques. De nombreuses autres espèces d’oiseaux migrateurs viennent également séjourner à l’Ichkeul ou sont seulement de passage avant de migrer plus au sud comme les spatules blanches, les limicoles, les passereaux et les hirondelles. D’autres espèces sont sédentaires ou nichent au parc comme les aigrettes et les hérons. Lors des hivers humides le nombre d’oiseaux d’eu en provenance du Nord et de l’Est de l’Europe varie entre 100000 et 200000 individus par an

L’espèce d’animaux la plus connue à l’Ichkeul est son buffle. En 1882, on comptait plusieurs centaines de têtes. La chasse a failli les exterminer en 1957. En 1960, il ne restait que trois bêtes. Grace aux mesures prises par la Direction Générale des Forêts, un nouveau troupeau a pu être reconstitué. L’origine de ce buffle reste incertaine. En 1240, l’Ichkeul était une réserve de chasse. Sous le bey, la responsabilité des buffles était confiée à un caïd des buffles. A cette époque on a donné à cette espèce le nom Djamous el Bey

Les arthropodes :

Nom vernaculaire	Nom latin
Abeille domestique	Apis mellifera
Guêpe commune
Taon des bœufs	Tabanus bovinus
Mante religieuse	Mantis religiosa
Cigale commune
Scarabée rhinocéros	Orcytes nasicornus
Grand paon de nuit	Saturnia pyri
Vulcain	Vanessa atalanta
Argue bleu	Polyommatus icarus
Belle dame	Vanessa cardui
Scorpion Maurus
Epeire jaune
Termite
Cétoine noire
Criquet à ailes rouges
Sauterelle des serres
Anax empereur
Demoiselle
Argus vert
Papillon citron

Les reptiles

Nom vernaculaire	Nom latin
Emyde lépreuse	Mauremys leprosa
Caméléon	Chamaeleo chamaeleon
Couleuvre fer à cheval	Hemorrhois hippocrepis
Couleuvre vipérine	Natrix maura
Couleuvre de Montpellier	Malpolon monspessulanus
Tortue grecque	Testudo graeca
Tarente de Mauritanie	Tarentola mauritanica
Lézard ocellé de l’Afrique du Nord
Vipère lebetine

Les amphibiens

Nom vernaculaire	Nom latin
Discoglosse peint	Discoglossus scovazzi
Grenouille rieuse	Rana ridibunda
Crapaud vert	(Pseudepidalea viridis
Crapaud de Mauritanie	Bufo mauritanicus
Salamandre de l’Afrique du nord	Pleurodeles poireti

Les poissons

Nom vernaculaire	Nom latin
Anguille	Anguilla anguilla
Muge	Liza ramada
Muge	Mugil cephalus
Bar	Dicentrachus labrax
Barbeau	Barbus barbus
Sole	Solea solea
Alose	Alosa fallax

Les mammifères

Nom vernaculaire	Nom latin
Buffle d’Ichkeul	Bubalus bubalus
Genette	Genetta genetta
Loutre	Lutra lutra
Sanglier	Sus scrofa
Porc épic	Hystrix cristata
Chacal doré	Canis aureus
Mangouste ichneumon	Herpestes ichneumon
Lérot	Eliomys quercinus
Renard
Lièvre
Lérot	Eliomys quercinus
Genette

Les oiseaux :

Nom vernaculaire	Nom latin
Rubiette moussier	Phoenicurus moussieri
Erismature à tête blanche	Oxyura leucocephala
Vautour percnoptère	Neophron percnopterus
Canard siffleur	Anas penelope
Sarcelle d’hiver	Anas crecca
Foulque macroule	Fulica atra
Sarcelle d’été	Anas querquedula
Chevalier combattant	Philomachus pugnax
Barge à queue noire	Limosa limosa
Sarcelle marbrée	Marmaronetta angustirostris
Poule sultane	Gallinula chloropus
Oie cendrée	Anser anser
Aigrette garzette	Egretta garzetta
Héron bihoreau	Nyctycorax nyctycorax
Fuligule milouin	Aythya ferina
Canard colvert	Anas platyrhynchos
Busard des roseaux	Circus aeruginosus
Grèbe huppé	Podiceps cristatus
Héron cendré	Ardea cinerea
Héron garde bœuf	Bubulcus ibis
Cigogne blanche	Ciconia ciconia
Avocette élégante	Recurvirostra avocetta
Glaréole à collier	Glareola pratincola
Sterne naine	Sterna albifrons
Aigle de Bonelli
Aigle botté
Canard souchet
Spatule blanche
Flamant rose
Tourterelle des bois
Merle noire
Alouette des champs
Grand corbeau
Chardonneret élégant
Faucon crécerelle
Chouette chevêche
Hibou grand-duc
Hirondelle des fenêtres
Rouge-gorge
Rouge queue de Moussier
Guêpier d’Europe
Vautour percnoptère

L’écomusée

Ce bâtiment a été construit avec les pierres de l’Ichkeul. Il permet aux visiteurs de s’informer sur l’ensemble du parc. Dans une grande salle, des informations sur l’Ichkeul sont expliquées par des panneaux et des dioramas. Des aires de repos sont aménagées autour de l’écomusée

La grotte

Dans le parc se trouve une grotte nommée « El Hewia », cette grotte est très connue pour les amateurs de la spéléologie. Sa beauté réside à ses concrétions (stalactites et stalagmites…). 4 espèces de chauves-souris ont été découvertes dans cette grotte

Sources

• L’Ichkeul, parcs nationaux de Tunisie, Direction Générale des Forêts, CRDA de Bizerte
• Le parc national à l’Ichkeul, ministère de l’Environnement et du Développement Durable
• Le parc national Ichkeul, Atlassia Editions, 2006
• L’Ichkeul, parcs nationaux de Tunisie