Le parc National de Bouhedma
Par Zaher Kammoun
Présentation
Le parc National de Bouhedma se situe à 85 km à l’Est de Gafsa, 100 km au Sud de Sidi Bouzid, 105 km à l’Ouest de Sfax et 30 km de la ville de Meknassy. Il relève des gouvernorats de Sidi Bouzid et Gafsa et il a une superficie de 16448 ha et se compose de 3 zones de protection :
- 5114 ha du côté Est autour du Bordj Bouhedma
- 2534 ha du côté d’Oued Haddej au centre du parc
- 1006 ha au Sud-Ouest du parc
Ce parc fait partie de la chaine Orbata-Bouhedma de l’Atlas Saharien Sud Oriental. L’altitude du Djebel est de 840 m et la forêt steppe de la plaine se trouve à +90m. Ce parc a été crée suite à un décret présidentiel n°80-1606 du 18-12-1980
Le parc avec sa forêt-steppe subtropicale d’Acacia raddiana ou Acacia gommier représente en Tunisie un vestige unique d’une ancienne savane présaharienne analogue à celle du Sahel africain.
Climat
Le versant nord du djebel est influencé par un bioclimat méditerranéen aride aux hivers tempérés alors que le versant sud du djebel est influencé par un bioclimat continental des hautes plaines de Gafsa et du Sahara aux hivers frais. La pluviométrie est très irrégulière et dépasse rarement les 100 mm par an. Les pluies tombent surtout en automne, en hiver et au printemps. En été, les journées peuvent avoir une température de 45° à l’ombre. Les vents chauds du Sahara et les tempêtes de sable sont fréquents. En hivers pendant les nuits claires, les températures peuvent descendre au-dessous de 0°. La température moyenne annuelle est de 17.2°C, tandis que la moyenne des maximas du mois le plus chaud est de 36.2°C et celle des minimas du mois le plus froid est de 3.8°C
Histoire
D’après Pline et P. Boudy, le Segui et le Bled Talh (région de Bouhedma) étaient peut-être le dernier refuge des cette partie de l’Afrique Septentrionale, des éléphants ayant servi au général Hannibal et au roi Massinissa pour leurs guerres
1853 : signalement de l’importance de la forêt d’Acacia raddiana en tant que vestige d’une ancienne forêt présaharienne
Au centre de la protection intégrale, à l’Est du parc, la forêt d’Acacia raddiana est dense et âgée se trouve le bordj Bouhedma, un ancien caravansérail construit en 1892
Depuis le début du 20ème siècle, les autruches, les antilopes oryx et addax et le guépard ont disparu des régions du sud de la Tunisie
1936 : Ahmed Pacha Bey décrète le Bouhedma parc d’état avec au moins 5000 ha
1963 : immatriculation à la Conservation de la Propriété Foncière sous le titre N° 36 S 2 Sfax
1977 : le Bouhedma est retenu comme réserve de la biosphère (MAB) par l’UNESCO
1980 : la création du parc national Bouhedma
Près du bordj, un écomusée a été construit
Archéologie
Depuis le Néolithique, il y a plus de 10000 ans, l’homme a laissé ses traces à Bouhedma : des silex taillés en outils ou en pointes de flèches et des chambres dolmeniformes dissimilés sous un tumulus artificiel entouré d’un cercle de pierres
A l’époque romaine, Bouhedma était une zone importante pour l’agriculture. Le piémont et la montagne étaient aménagés de terrasses pour retenir le sol et l’eau. D’importants ouvrages hydrauliques ont été découverts : des barrages, un mur de plus de 8 m de haut et plusieurs centaines de mètres de long pour dévier les eaux d’Oued Haddej, des canaux et des bassins de retenue pour irriguer les champs et les terrasses. Les romains ont aménagé aussi des routes pavées en pierres. Les habitants actuels utilisent encore des citernes datant des romains
Géologie
Le Djebel Bouhedma fait partie de la chaine de montagnes Orbata-Bouhedma qui commence à l’Est de la ville de Gafsa et se termine à l’Ouest de Mezzouna. Ce sont les derniers contreforts de l’Atlas Saharien. Le Djebel Bouhedma sépare l’ère continentale saharienne du sillon tunisien de la dorsale. Il se présente comme un anticlinal évidé, dont les deux flancs relèvent du Crétacé moyen avec ses marnes et ses calcaires
La cuvette centrale Est draine les eaux de l’Ouest Bouhedma et donne lieu à la Source d’Ain Charchara et la cuvette centrale Ouest draine les eaux d’Ouest el Mech et donne lieu à la source thermale du Hammam Haddej. Les cuvettes datent du Jurassique au Crétacé inférieur reconnaissables par les marnes colorées, le gypse blanc et le calcaire. Le piémont sud est formé du quaternaire provenant de l’érosion des flancs de la montagne. Ces dépôts ont été encroutés par le calcaire et le gypse
Dans la partie ouest du parc, la plaine est formée de sable de Nebkas et de petites dunes et vers la Sebkhet Naouel de sable et d’alluvions gypso-salés
Faune
La faune est caractérisée par des animaux sahariens et présahariens. Les animaux sont parfaitement adaptés au climat aride saharien et beaucoup d’animaux n’ont même pas besoin de s’abreuver.
Depuis le début du siècle, les autruches, les oryx, les addax et les guépards ont disparu.
L’addax, l’oryx et l’autruche ont été réintroduits au parc en 1986.
Le parc abrite 13 espèces de chauves souris.
On note la présence de 27 espèces de reptiles, 4 espèces d’amphibiens et 270 espèces d'invertébrés.
Les mammifères :
Nom vernaculaire | Nom latin |
Mouflon à manchettes | Ammotragus lervia |
Goundi | Ctenodactylus gundi |
Gazelle dorcas | Gazella dorcas |
Addax | Addax nasomaculatus |
Porc épic | Hystrix cristata |
Oryx | Oryx dammah |
Gazelle mhorr | Dazella dama mhorr |
Chacal doré | Canis aureus |
Hérisson du Sahara | Paraechinus aethiopicus |
Genette | Genetta genetta |
Hyène rayée | Hyaena hyaena |
Caracal | Caracal caracal |
Le chat ganté | Felis lybica |
Le sanglier | Sus scrofa |
Le lièvre | Lepus capensis |
Le hérisson du Sénégal | Atelerix algirus |
La crocidure méditerranéenne | Crocidura pachyura |
La crocidure de Whitaker | Crocidura whitakeri |
Le macroscélide de Rozet | Elephantulus rozeti |
Le chacal d’Algérie | Canis anthus |
Le renard roux | Vulpes vulpes |
Le renard famélique | Vulpes rueppellii |
La zorille de Libye | Ictonyx libyca |
La mangouste ichneumon | Herpestes ichneumon |
La belette commune | Mustela nivalis |
Le lérot du Maghreb | Eliomys mumbianus |
La petite gerboise d’Egypte | Jaculus jaculus |
La petite gerbille du sable | Gerbillus gerbillus |
La gerbille champêtre | G. compestris |
La gerbille naine d’Egypte | G. amoenus |
Le mérione du désert | Meriones crassus |
Le mérione à queue rouge | M. libycus |
Le rat des sables diurne | Psammomys obesus |
La souris grise | Mus musculus |
La souris d’Afrique du Nord | Mus spretus |
Le rat surmulot | Rattus norvegicus |
Les oiseaux :
Nom vernaculaire |
Nom latin |
Aigle royal | Aquila chrysaetos |
Cratérope fauve | Turdoides fulva |
Ganga cata | Pterocles alchata |
Autruche d’Afrique du Sud | Struthio camelus australis |
Loriot d’Europe | Oriolus oriolus |
Huppe fasciée | Upupa epops |
Rubiette de moussier | Phoenicurus moussieri |
Bruant striolé | Emberiza striolata |
Sirli de désert | Alaemon alaudipes |
Courvite isabelle | Cursorius cursor |
Engoulevent | Caprimulgus sp. |
Traquet à tête blanche | Oenanthe leucopyga |
Bouvreuil githagine | |
Hibou grand duc | Bubo bubo |
Perdrix gambra | Alectoris barbara |
Guêpier d’Europe | Merops apiaster |
Aigle de Bonelli | Aquila fasciata |
Aigle botté | Hieraaetus pennatus |
Faucon pèlerin | Falco peregrinus |
Faucon crécerelle | Falco tinnunculus |
Faucon lanier | Falco biarmicus |
Buse féroce | Buteo rufinus |
Chouette chevêche | Athene noctua |
Chouette effraie | Tyto alba |
Serin cini | Serinus serinus |
Chardonneret élégant | Carduelis carduelis |
Pintade de numide | Numida meleagris |
Autruche d’Afrique du Nord | Struthio camelus camelus |
caille | Coturnix coturnix |
Les reptiles :
Nom vernaculaire |
Nom latin |
Fouette queue | Uromastix acanthinurus |
Tortue grecque | Testudo graeca |
Caméléon | Chamaeleo chamaeleo |
Cobra | Naja haje legionis |
Vipère des pyramides | Echis carinata |
Vipère à cornes | Cerastes cerastes |
Varan du désert | Varanus griseus |
Agame variable | Agama mutabilis |
Tarente de Mauritanie | Tarentola mauritanica |
Couleuvre algire | Coluber algirus |
Serpent des sables | Psammophis schokari |
Les amphibiens :
Nom vernaculaire |
Nom latin |
Crapaud vert | Bufo viridis |
Discoglosse peint | Discoglossus pictus |
Crapaud de Mauritanie | |
Grenouille verte | Rana esculenta |
Flore
En 1853, il y avait une forêt d’Acacia raddiana d’environ 38000 ha. En 1957, il ne restait plus de 10 ha autour du Bordj Bouhedma. Une protection appliquée depuis 1964 et les fortes pluies de 1968-1969 ont permis la régénération naturelle d’une grande partie de cette forêt qui a une surface actuelle de 16000 ha. Le parc national de Bouhedma abrite 400 espèces de plantes
Nom vernaculaire |
Nom latin |
Acacia gommier | Acacia raddiana |
Genévrier de Phénicie | Jenuperus phoenicea |
Retam | Retama raetam |
Armoise blanche | Artmesia herba alba |
Sumac | Rhus tripartitum |
Alfa | Stipa tenacissima |
Lentisque | Pistacia lentiscus |
Oléastre | Olea europea |
Câprier épineux | Capparis spinosa |
Laurier rose | Nerium oleander |
Harmel | Peganum harmala |
Globulaire | Globularia sp. |
Pistachier de l’atlas | Pistacia atlantica |
Euphorbe be Bivona | Euphorbia bivona |
Romarin | Romarinus offcinalis |
Jujubier | Ziziphus lotus |
Calycotome villosa | |
Thymus capitatus ssp. Algeriensis | |
Cenchrus ciliaris | |
Artemisia campestris | |
Astragalus armatus | |
Aristida pungens | |
Tatrepogon villosus | |
Tricholaena tenerzffae | |
Digitaria communtata | |
Inula crithmoides | |
Limoniuna pruinosum | |
Sonchus altissima | |
Halocnemurn strobilaceunm | |
Juniperus oxycedrus | |
Ephedra altissima | |
Juncetea maritimus | |
Juncus maritimus | |
Carex distans | |
Phragmites communis | |
Typha angustifolia | |
Salsola vermiculata | |
Marrubium vulgare | |
Marrubium alysson | |
Zygophyllum album | |
Dittrichia viscosa | |
Juncus capitalus | |
Juncus Bufonius | |
Salicornia fruticosa | |
Atriplex halimus | |
Arthrocnemum glaucum | |
Arthrocnemum indicum, | |
Salsola kalli | |
Asparagus albus | |
Asparagus stipularis | |
Rhamnus oleoides | |
Genista microcephala | |
Malva parviflora | |
Malva silvestris | |
Diplotaxis harra | |
Chenopodium murale | |
Solanum nigrum | |
Globularia alypum | |
Lavandula mulifida | |
Ruta montana | |
Frankenia pallida | |
Frankenia pulverulenta | |
Frankenia thymfolia | |
Lygeum spartum |
Stations utiles
Le Caravansérail
Un caravansérail construit en 1892 porte aujourd'hui le nom "le bordj Bouhedma"
L’écomusée
L’écomusée fournit aux visiteurs des informations concernant les spécificités de l’écosystème et les espèces animales et végétales présentes dans le parc à travers une exposition scientifique permanente
L’enclos d’acclimatation
Cet enclos est conçu pour abriter des animaux récemment réintroduits au parc de Bouhedma afin de les habituer au milieu environnant avant des les lâcher dans le parc. Les visiteurs peuvent ainsi observer les mouflons à manchettes. Tout près se trouvent les aires de pique-nique aménagés à l’ombre de l’eucalyptus
Forêt de gommier
Cette station est située dans la plaine, elle représente un lieu de collecte des eaux pluviales d’où en trouve un couvert végétal dense pouvant dépasser 80% lors des saisons humides. Cette station constitue un lieu de pâturage préféré pour l’Oryx et la gazelle Dorcas
La source d’eau Ain Nouh
Située sur le versant Ouest du Djebel Bouhedma, la source domine le parc, on trouve aussi une pépinière. Les eaux de cette source sont utilisées pour les activités d’aménagement et de reboisement dans le parc. Le couvert végétal dépassant 30%, est constitué surtout d’alfa
Ain Charchara
Sources
- Ridha DALHOUMI, Patricia AISSA, Stéphane AULAGNIER: Bat species richness and activity in Bou Hedma National Park (central Tunisia)