Kerkouane
Par Zaher Kammoun
Le site de Kerkouane ou Kerkouene se trouve à l’extrémité septentrionale du Cap Bon au nord de la Tunisie à 12km de Kélibia
Kerkouane est un toponyme moderne, on ignore encore le nom d’origine de cette ville située au Cap Bon. Elle est l’unique cité punique conservée en Tunisie et c’est pour cela elle est inscrite dans la liste du patrimoine mondial UNESCO dans les années 80. Elle fut détruite définitivement avant l’installation des romains en Tunisie, par le consul romain Regulus vers 256-255 avant J.C. Le site fut ensuite abandonné
Kerkouane a été découverte par Pierre Cintas et Charles Saumagne et les premières fouilles ont été exécutées en 1953. Les fouilles se suivent après, on a les fouilles de1956-1961, 1965-1966, 1976-1977
Cette cité de 7 à 8ha de surface est délimitée par deux murailles séparées par un couloir large de 10m et flaquées par des tours et des portes. Elle est située au bord de la mer et existait au moins dès le 6ème siècle avant J.C
Cette ville rassemblait tous les artisans : les verriers, les potiers, les coroplastes, les bijoutiers, les fabricants de pourpre mais aussi les pécheurs et les commerçants. On a estimé le nombre d’habitants à presque 2000 âmes.
De forme quasi-circulaire, Kerkouane rassemble à ville fortifiée. Elle possède un plan régulier avec des rues assez larges (4m environ), des places et des ilots d’habitations
La fortification
Les fouilles de Kerkouane ont permis la mise au jour d’une muraille doublée d’un avant mur. Elle remonte au 4ème-3ème siècle avant J.C. Les deux courtines de 2m d’épaisseur sont séparées par un intervallum de largeur qui varie entre 7,5m et 13m doté de plusieurs dépendances et servant à la circulation des défenseurs. Des escaliers attestent également l’existence d’un chemin de ronde
L’avant mur extérieur est percé de deux portes monumentales (la porte du Couchant et la porte Sud) et de quatre poternes, la courtine intérieure est flanquée de cinq saillants
Le plan d’aménagement du site
Le site de Kerkouane est formé par des ilots d’habitation et d’autres édifices séparés par des rues de largeur entre 3,15m et 4,875m avec une moyenne de 4m. Plusieurs places de différentes tailles existent aussi et jouaient un rôle économique
Le nombre d’habitation est estimé à 300 alors après calcul on peut dire que le nombre d’habitants de Kerkouane était de 2100 âmes
L’habitation domestique
Les maisons de la ville sont à plupart à cour centrale. Une porte permet l’accès à un couloir généralement long, étroit et coudé qui mène vers la cour simple ou avec portique. Autour de cette cour s’ordonnent les pièces pavées d’un ciment rouge avec parfois des éclats de marbre blanc (signe de Tanit par exemple). Dans la cour, on trouve un puits, la nappe ici n’est pas profonde de donne une eau de bonne qualité malgré qu’on est à proximité de la mer. Dans la maison, il y a aussi une cuisine, une pièce d’apparat qui est grande et servait à recevoir des invités et une salle d’eau qui se compose d’un baignoire-sabot, de vasques et d’éviers
L’eau usée est évacuée par une canalisation en plomb ou en poterie, elle s’écoule vers l’extérieur par une rigole
Quelques maisons de Kerkouane possèdent un plan en enfilade, elles sont dotées d’un vestibule abritant une salle d’eau et précédant la cour. D’autres maisons sont construites selon un plan linéaire
Parmi les maisons fouillées:
La maison de Tanit
La maison de Sphinx
La maison à péristyle
La maison avec deux banquettes et un autel destinés pour un culte domestique
Maison à cour centrale
Les salles d’eau
Le site archéologique de Kerkouane a conservé de très belles salles d’eau. On trouve dans ses salles un vestiaire, une baignoire à siège et à accoudoirs dite baignoire sabot, un évier…
Les monuments publics
Les monuments publics à Kerkouane sont rares mais on a mis à jour un sanctuaire de type sémitique, il est constitué d’une entrée monumentale avec deux piliers frontaux, d’un vestibule flanqué d’une salle à banquettes, d’une cour ou l’on reconnaît l’autel et le podium de la chapelle. On a trouvé dans une cachette du sanctuaire un matériel conservé appartenant à une base époque romaine : il s’agit de lampes et de bols disposés les uns dans les autres
Des thermes publics ont été identifiés, ils se trouvent près du temple. Il y avait donc un lien probable entre ce lieu de culte et ces bains, entre la purification et le sacré
Les édifices en relation avec l’artisanat
Kerkouane a connu les métiers de l’artisanat, les artisans étaient identifiés grâce aux objets découverts sur cite, aux déchets comme les coquilles brisées de murex mais on a découvert aussi des fours de potiers, des fours à chaux, des fours de verriers, des fondeurs…
On a trouvé aussi des échoppes et des boutiques ateliers
Le port
Les fouilles de Kerkouane n’ont pas encore fourni sur des détails sur des constructions portuaires
La cité des morts
L’aire funéraire rattachée à Kerkouane est constituée des nécropoles de Jebel Melazza, Arg el Ghazouani et Dar Es-Saafi. L’inhumation et l’incinération étaient pratiquées dans la cité.
Un matériel très riche découvert dans les tombes est daté du 6ème siècle au 3ème siècle avant J.C
La nécropole d’Arg el Ghazouani a une surface de 12600 m2, les tombes sont creusées sur une colline qui se trouve à 500m de Kerkouane. Cette nécropole est connue depuis le début du 20ème siècle. Plusieurs personnes ont pillé les tombes par des fouilles clandestines. Plusieurs objets sont aujourd’hui exposés à l’extérieur de la Tunisie dans les musées dans et des les collections privées.
Les fouilles systématiques ont commencé en 1939, ils ont fourni une riche collection de mobilier funéraire : des la poterie ordinaire, de la céramique à vernis noir de production locale ou étrangère, des bijoux en or et en argent, des hachettes rasoirs, des amulettes… Une partie est exposée aujourd’hui au musée de Kerkouane. Quelques tombes possèdent des inscriptions de caractère punique évoquant le nom ou le métier du défunt. On trouve des tombes à fosses (une cinquantaine), des tombes tripartites
La nécropole de Jebel Melezza a été fouillée en 1939, elle est célèbre par la tombe 8 qui a fournit des peintures qui racontent le voyage de l’âme, représenté par le volatile (un coq), vers l’au-delà symbolisé par une cité fortifiée. L’âme, s’apprête à prendre place dans la tombe, représentée par un mausolée, elle y séjourne pendant une période, puis quitte le caveau pour entreprendre le voyage qui la conduira à la cité des âmes
Les matériaux et les techniques de construction
Les habitants de Kerkouane utilisaient plusieurs matériaux de construction comme la terre, l’argile, la brique crue, la brique cuite, la pierre brute, la pierre de taille, l’obsidienne, le marbre, le basalte, les métaux, le bois
Plusieurs techniques de construction ont été découvertes dans le site comme la construction en gros blocs, en arêtes de poisson ou en épi, en brique crue, en pisé, en moellon. La construction en opus africanum existe aussi. Plusieurs types de liants étaient utilisés
La décoration
La décoration constitue une des préoccupations importantes du bâtisseur à Kerkouane. On utilisait des colonnes, des pilastres, des chapiteaux, des corniches, des appliques en stuc ou en plâtre, des images peintes…
Le sol peut être pavé en opus signinum. On a trouvé un joli symbole de Tanit dans une maison du site
La sculpture zoomorphe était aussi appliquée à Kerkouane, on a trouvé une tête de taureau
Des objets trouvés sur site
Sources
- Kerkouane, a punic town in the berber region of Tamezrat, M’hamed Hassine Fantar
- Kerkouane, une cité punique au Cap Bon, Mhamed Hassine Fantar
- Les fortifications en Tunisie, Neji Djelloul
- Carthage, les lettres et les arts, M’hamed Hassine Fantar
- A la découverte du Cap Bon, guide historique et archéologique, Samir Aounallah, Mounir Fantar